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Le Grand Hôpital de Charleroi : l'accompagnement spirituel en mutation

Un projet RESSPIR
Résumé

Confronté à de profondes mutations sociologiques, et en vue de la construction d’un nouvel hôpital, un regroupement d’hôpitaux chrétiens de la région de Charleroi (GHdC) en Belgique a entrepris de mener une réflexion sur la dimension spirituelle au sein de l’hôpital, non seulement en vue de faire évoluer son modèle d’accompagnement spirituel vers un paradigme qui intègre la diversité religieuse de ses patients et de son personnel, mais aussi pour donner place à cette dimension de manière transversale au sein du « prendre soin ».

Vous trouverez dans le document ci-joint l’historique de ce changement en cours, retraçant tout d’abord la chronologie factuelle des changements et des réalisations accomplis : voir l’historique du projet (pdf).

Marcela Lobo et Dominique Baude

Marcela Lobo-Bustamante et Dominique Baude, pourriez-vous vous présenter et nous dire quelle est votre fonction et rôle au sein du GHDC?

Dominique Baude est la responsable du « service Humanisation » qui vise à donner une dimension plus humaine à l’accueil et au séjour du patient ainsi qu’à rendre l’hôpital plus convivial et à l’ouvrir sur le monde qui l’entoure pour les patients et le personnel.

Ce service œuvre sur 3 axes :

  1. L’animation : apporter du réconfort à la personne à travers diverses activités (St Nicolas, Fête des Mères, Actions caritatives …)
  2. La dimension spirituelle dans le soin : accueillir la dimension spirituelle du patient et du personnel dans le soin est fondamentale car elle fait partie intégrante de tout être humain. Elle donne du souffle, du sens et permet au patient de mobiliser ses ressources lorsque celui-ci traverse la maladie.
  3. Le bénévolat : donner place au malade en tant qu’individu par une présence bienveillante; il répond à l’expérience d’un manque pour des besoins d’une autre nature que le soin et pour lequel il n’y a pas de ressources prévues (accompagnement, détente, écoute …).

Marcela Lobo Bustamante est docteure en théologie. En 2016, elle a rejoint le service humanisation pour réfléchir à l’amélioration de l’intégration de la dimension spirituelle dans la relation de soin en tenant compte de la pluralité des convictions religieuses et philosophiques.

Comment en êtes-vous arrivées à proposer un projet de recherche sur la question de la spiritualité au GHDC? / En quoi ce projet de recherche vous a-t-il semblé nécessaire?

En 2008, la responsable du service humanisation fait face à une équipe pastorale en difficulté suite à la fusion hospitalière et à une réalité sociologique multiculturelle et pluriconvictionnelle. La perspective de la construction d’un nouvel hôpital initie une multitude des groupes de travail en vue de l’organisation future. Ce contexte de foisonnement réflexif au sein de l’institution sera l’occasion de proposer à la Direction un projet de réflexion qualitative sur la place de la dimension spirituelle dans la relation de soin.

Cette recherche a semblé nécessaire, d’une part par la position stratégique de la fonction de responsable humanisation, position témoin, lui permettant de percevoir la dimension spirituelle comme une ressource clé dans la relation soignant-soigné. Cette dimension existait mais elle n’était pas identifiée de cette manière. Il y a donc une nécessité de mettre en place une réflexion pour favoriser une synergie entre les différents acteurs et différentes compétences autour du patient.

D’autre part, par la spécificité du lieu où la maladie fait émerger des questions fondamentales qui bousculent les repères de la personne et la déstabilisent dans un environnement médical qui évolue rapidement et qui ouvre des perspectives nouvelles (nouvelles technologies entre autres) à travers la prise en charge.

Pour que cette recherche se mette en place, il a fallu créer une structure permettant une réflexion dynamique et évolutive sur la dimension spirituelle.

structure

Le groupe de réflexion pour améliorer l’intégration de la dimension spirituelle dans la relation de soin (NH302), coordonné par Dominique Baude et Marcela Lobo, se compose d’une équipe projet qui pilote trois groupes de travail.

Cette équipe a pour mission de réfléchir à la stratégie et au plan d’action pour la diffusion d’une culture de Spiritual Care dans les 13 pôles de soins de l’hôpital. Elle est actuellement composée de volontaires de différentes disciplines : deux médecins, une psychologue, une médiatrice patiente, une accompagnatrice spirituelle, les deux cheffes de projet et un représentant du réseau RESSPIR. Elle se réunit à raison de 6 à 7 rencontres de 2h par an.

equipe-GHDC


De gauche à droite : Dominique Jacquemin, Michel Lagrange, Florence Bertholet, Frédéric Thys, Marcela Lobo, Dominique Baude

Par pôle de soins, on retrouve donc :

  • Un groupe de travail « Soignants », constitué de soignants volontaires venus des différentes unités qui composent le pôle. L’objectif de ce groupe de travail est d’identifier, d’abord, les besoins spirituels généraux et particuliers à chaque pôle de soins pour après y implémenter une culture du Spiritual Care. Cette implémentation se fait en dialogue avec l’équipe projet. Présentation du travail du pôle Mère-Enfant.

  • Un groupe de travail « Accompagnement spirituel et religieux », composé des membres de l’équipe de l’hôpital qui a pour mission d’« accompagner spirituellement le patient, sa famille et le personnel soignant.
equipe-acc‧spi


De gauche à droite : Dominique Baude, Christine De Vleeschouwer, Dominique Jacquemin, Agnieszka Wronska, Françoise Devilers, Marcela Lobo.

  • Un groupe de travail « Interconvictionnel », composé de volontaires extérieurs, représentants des différentes religions reconnues en Belgique et de la pensée laïque. Leur mission est de réfléchir à la prise en compte de la spiritualité des patients et de leur entourage dans un monde pluriconvictionnel et pluriculturel.
equipe interconvict.

De gauche à droite : Jean-Paul Lecomte, Céline Vanderbeken, Florence Bertholet, Mohamed Azis, Dominique Baude, Marcela Lobo, Martine Chif.

Qu’avez-vous appris à quoi vous ne vous attendiez pas?  (ou qu’est-ce qui vous a surprises durant ce temps de recherche?)

  • Au départ, aborder cette thématique auprès des soignants nous semblait un véritable challenge. A contrario, la réceptivité et l’accueil du projet sur le terrain nous ont permis de prendre conscience à quel point celui-ci répondait aux attentes et aux questionnements des soignants.
  • Les difficultés rencontrées au sein de l’équipe pastorale liées aux changements de paradigmes de passer d’une mission de présence d’Église à une présence signifiante au cœur du monde.
  • La présence, l’assuétude et la qualité des personnes qui volontairement travaillent à la réalisation du projet.
  • Au-delà de la détresse des soignants, persiste une véritable attention et un dévouement aux malades.
  • L’intérêt porté par d’autres institutions qui nous inscrit dans un mouvement général plus large.
  • La réactivité des soignants à l’invitation au colloque « Technique et humanité : un paradoxe à l’hôpital ».
  • Le positionnement de l’institution.
  • La méconnaissance de l’importance de la dimension spirituelle dans la prise en charge du patient.
  • L’importance de la « traduction de langage » pour travailler avec les équipes de soins qui a permis une mise en évidence du Spiritual Care déjà pratiqué sur le terrain mais pas identifié de cette manière.

Pourriez-vous nous donner un exemple?

Aujourd’hui, c’est un projet concret de sensibilisation et d’actions concrètes vers lequel vous allez entrer, accompagnant ainsi 3 (à préciser) unités de soins. Quelles sont les priorités de ce projet? Pouvez-vous nous le décrire?

Dans les 2 années à venir, nous voudrions :

  1. Implémenter une « cellule Sens » dans le Pôle Mère-Enfant. L’objectif visé à long terme est que dans chacun des 13 pôles de soins, il y ait une cellule qui réfléchisse à comment donner du sens à la relation du soin, à la fonction soignante, au séjour du patient, à la dynamique de l’équipe et à l’humanisation dans chaque service en tenant compte des spécificités du pôle. Cette cellule serait composée des dimensions psychologique, philosophique et théologique. (L’esprit, le sens et l’être)
  2. Continuer le travail de sensibilisation du Spiritual Care dans les unités des soins intensifs, qui a commencé début 2022.
  3. Répondre aux demandes spontanées du terrain : actuellement nous avons déjà reçu 3 : oncologie, soins palliatifs et néonatologie.
  4. Sensibilisation et formation pour ceux qui désirent se former au Spiritual Care : nous rencontrons les équipes à leur demande lors d’un staff par ex. et nous les informons/sensibilisons et nous allons aussi former les bénévoles qui travaillent dans la MME (Maison Mieux-Être) pour les patients en oncologie (médecine intégrative où il manque la dimension spi).
  5. Projet d’intégrer cette formation dans le catalogue de formations permanentes.

Qui va s’y engager? Quel rôle y prendrez-vous?

  • En octobre 2021, le GHdC a signé un contrat de partenariat avec le réseau international RESSPIR-UCLouvain pour pouvoir mettre en place de manière qualitative une culture du Spiritual Care.

En 2024, lorsque les murs du  nouvel hôpital seront achevés, comment rêvez-vous l’accompagnement spirituel des personnes accueillies au GHDC et de leurs proches ainsi que du personnel?

  • Cellule sens dans chaque pôle des soins (cellule transversale)
  • Formation continue au Spiritual Care
  • Formation des deux cadres au Spiritual Care
  • Élargissement de l’équipe de l’accompagnement spirituel

Pour aller plus loin, voici quelques documents de réflexion mis à votre disposition ci-dessous.

Documents

Historique du projet
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Pôles de soins
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ADN travailleur pastoral/Aumônier chrétien au sein de l'hôpital
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Les missions du psychologue et de l’aumônier à l’hôpital
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Spiritualité, religion et neutralité dans l’hôpital
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Tableau synoptique
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Prise en charge spirituelle du patient
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